Mai06

Confinement, jour 50.

Posté par Frank Admin le 06.05.20  ~  Posted in: Non catégorisé

J'avais dans l'idée de m’écœurer en prose, à la vue aujourd'hui du Président Omniscient qui s'agite en direct live sur des chaînes d'info indulgentes, à l'occasion de la découverte qu'il fît à la lecture d'une lettre ouverte commise par nombre d'artistes, du fait qu'il y aurait en France une Culture avec un grand C. Culture au chevet de laquelle il ne lui en faut pas plus pour se poser, toutes gesticulations dehors et fort à propos, en sauveur.

Mais avant cela, je viens de voir une vidéo postée par Vincent Lindon à propos de la crise sanitaire actuelle, à propos de laquelle il ressort des commentaires lus ici et là que beaucoup de gens lui reprochent de parler ainsi de l'état de la France alors qu'il n'est pas compétent, et que pour cette raison beaucoup s'enorgueillissent de lui pourrir la tête sans avoir écouté un seul mot de sa contribution.
En gros : il ferait mieux de nous divertir et de la fermer.

Ce à quoi je réponds, en un, oui mais enfin là, pour nous divertir, les artistes, faudrait peut-être déjà qu'ils puissent sortir, et ne pas crever de faim. Je ne suis pas inquiet pour Lindon, mais tous les intermittents ne sont pas aussi bien lotis.
Et puis, en deux, pourquoi ne pourrait-il pas donner sa vision des choses quand des millions de connards le font impunément à longueur de journée sur des réseaux sociaux ? Y compris donner leur avis sur cette prestation qu'il n'ont pas vu, donc sur laquelle il sont incompétents. CQFD.

Je trouve donc un peu lapidaires le fait de mettre sa prose directement à la poubelle sans l'avoir écoutée. Soit on a pas envie d'écouter, c'est parfaitement autorisé, mais on devrait alors aussi être autorisé à ne pas donner son avis. Soit on l'écoute et on peut s'autoriser à le donner.
Alors j'ai écouté.

Bon, son texte n'est effectivement qu'un résumé, vu de sa fenêtre, de la situation actuelle et de ses origines (par "situation actuelle" j'entends l'état délabré du secteur de la santé à l'arrivée de la pandémie, mais aussi de la déconnexion des soit-disants "élites" gouvernantes). Pas de surprise, mais c'est toujours bon à rappeler, même si j'imagine que beaucoup de néolibérophiles ne seront pas du tout d'accord avec l'analyse.

Après, sur les propositions qu'il tente, je comprends qu'on dise que ce n'est pas son rôle, mais, de la même manière qu'il y a 60 millions de sélectionneurs en France à l'occasion d'une coupe du monde de foot, le fait de ne pas être compétent sur un domaine particulier n'a jamais empêché personne de donner son avis.

Bon, à vrai dire là aussi, ses propositions mêlées de Jaune et de RIC, avec un soupçon d'idées colorées révolution française, relèvent de l'utopie même si j'y adhérerais si je ne les savais pas irréalisables. Mais il a le droit d'y croire, la liberté de culte est inscrite dans la Constitution Française.

Pour en revenir à la culture en perdition, une fois qu'on a dit qu'elle contribuait autant au PIB que l'aviation, et 7 fois plus que l'automobile, et que c'est pourtant PSA qu'on autorise à rouvrir ses usines, et à Airbus qu'on (je dis "on", parce que, comme disait Coluche, "rigolez pas, c'est avec notre pognon") qu'on file du blé, on a dit l'essentiel. Les bagnoles que personnes n'achète pour raisons de confinement semblent être devenues un produit de première nécessité, comme les avions. Mais pas des spectacles à même de sauvegarder la santé mentale de 67 millions de confinés.

Je ne dis pas que ce n'est pas bien de filer nos économies à Airbus pour sauver 135000 emplois directs et autant d'indirects, et sauver la région toulousaine par la même occasion. Ce que je dis, c'est je ne comprends pas pourquoi il n'a pas paru aussi urgent de sauver les 450000 emplois directs liés à la culture, plus le bon million d'emplois indirects qu'elle génère. Pourquoi a-t-il fallu que des artistes soient obligés d'écrire une lettre ouverte pour que Macron s'aperçoive qu'il y a une Culture en France, et pas que des bagnoles et des zincs ??

Je crois savoir pourquoi. Il fait un syndrome post-traumatique, il a occulté la Culture après avoir été cloué au pilori lorsqu'il a sorti Brigitte au théâtre pour montrer au gens d'en bas qu'il fallait sortir malgré le coronavirus. Une semaine avant de décréter le confinement.